F.N. – Fabrique Nationale d’Armes de Guerre
Automobiles 1899-1935
Motocyclettes 1962
Poids lourds 1970
1. Des origines de la firme à la Première Guerre mondiale – les débuts de l’entreprise.
C’est le 3 juillet 1889 que fut fondée à LIEGE la “Fabrique Nationale d’armes de guerre” dont le sort sera lié dès 1896 au puissant groupe allemand Ludwig LOEWE & Cie, spécialisé dans le domaine des armes portatives et de leurs munitions. La F.N. cherchera à diversifier ses productions vers des domaines moins dépendants. Le premier produit fut la bicyclette dont la construction sera entamée en avril 1896 (elle se poursuivra jusqu’en 1926).
fn_1900En mai 1898, la F.N. mettra au point un modèle de bicyclettes sans chaîne de transmission, le vélo acatène. Dès 1897, la F.N. qui pense à l’automobile achète un quadricycle français pour le faire étudier par ses ingénieurs et, à défaut d’en obtenir la licence de fabrication, décide de construire elle-même un prototype de voiturette. Avec le concours de J. de COSMO – mécanicien italien engagé par la F.N. en janvier 1899 et qui avait auparavant travaillé dans plusieurs usines européennes – la F.N. met au point un premier prototype dont elle décide la mise en fabrication d’une série de 100 exemplaires en 1900. Ces voiturettes possédaient un moteur deux cylindres (75 x 90) de 800 cc à soupapes latérales placé transversalement, allumage par bobine et trembleur, graissage par barbotage, refroidissement par eau par pompe, changement de vitesse par courroies avec deux vitesses et marche arrière, et transmission par courroie et secondaire par chaîne. Ce modèle qui pouvait être équipé de différents types de carrosseries, remporta un tel succès – dont trois grands prix à l’exposition Universelle de PARIS de 1900 – que sa construction se poursuivra en 1901 et 1902, avec une production totale de 280 unités. J. de COSMO quittera la F.N. en 1903 pour créer sa propre firme.
La F.N. envisagera à cette époque la construction de véhicules électriques : ainsi parle-t-on de la présence d’une F.N. électrique à un défilé à SPA en juillet 1899 (sans doute une Columbia d’origine américaine) mais aussi de la construction en 1901 d’une grosse voiture pétroléo-électrique de 100 cv avec l’aide de Camille JENATZY pour compte du baron Pierre de CATERS. En 1902, une voiture de 14 cv, ou plus exactement un châssis-car avec transmission à cardan sera présenté au salon de PARIS.
C’est à cette époque que commence pour la F.N. la production de motocyclettes, des monocylindriques à partir de décembre 1901, puis à quatre cylindres des 1905. Le succès sera tel que la firme liégeoise mettra en veilleuse sa production automobile qui ne reprendra réellement qu’en 1906, époque où la F.N. crée sa propre fonderie, ce qui la rend alors autonome dans la majeure partie de ses fabrications. Dans l’intervalle, la F.N. passe un accord en 1902 avec DE DION BOUTON afin de vendre ses voitures en Belgique puis, en 1905 avec l’industriel liégeois Albert ROLLAND de la société LA LOCOMOTRICE qui possédait la licence de construction de la ROCHET-SCHNEIDER fabriquée en sous-traitance chez NAGANT. Albert ROLLAND céda sa licence à la F.N. dont il devient l’agent pour la région liégeoise.
C’est ainsi qu’en 1906 la F.N. reprend la construction automobile en produisant une ROCHET-SCHNEIDER Belge (RSB) ou FN “6900” équipée du radiateur typique de la marque lyonnaise, d’un moteur quatre cylindres jumelés de 30/40 cv, allumage par magnéto haute tension et transmission par chaînes.
Constamment améliorée jusqu’en 1913, la FN 6900 dont la production totale sera de 125 exemplaires, connaîtra des acquéreurs prestigieux tels le SHAH de PERSE, le KRONPRINZ d’Allemagne et le ROI Pierre de SERBIE.
Mais des modèles s’adressant à une clientèle moins fortunée verront également le jour durant cette période, ainsi :
– en 1906 la quatre cylindres “type 2000” puis les 2000 A et 2100 munies d’un carburateur à boisseau;
– en 1908 la “type 1400”, de 8/10 cv qui innove par un changement de l’alésage permettant une plus grande course du piston, suivie des 1500 et 1560;
– en 1911 la F.N. “type 1600” pour laquelle fut mis au point un dispositif de suspension par jumelles encore utilisé;
– en 1913 deux modèles de voitures moyennes “type 2400” caractérisée par un moteur de quatre cylindres en un seul bloc, un embrayage à disques métalliques renforcés et un cardan à dés;
– et fin 1913, présentée au salon de PARIS où 300 voitures de ce type seront vendues, la F.N. “type 1250” à moteur 4 cylindres super carte (60 x 110) et embrayage à cône cuir, sans doute la première des petites voitures très caractéristique par sa forme “en canot”. Le véhicule, contrairement à ce qui se passait généralement alors, était livre équipé d’une carrosserie découverte, en bois, fabriquée à LYON.
La F.N. qui avait construit en 1912 un nouveau hall de 8.500 m² pour y reloger son département automobile était devenue une des firmes automobiles les plus modernes d’Europe et sans doute la plus prospère de Belgique avec un total de 3.600 voitures livrées avant 1914 dont un grand nombre destiné à l’Angleterre, la France, l’Allemagne et la Hollande.
L’invasion allemande donnera un coup d’arrêt à cette expansion par la réquisition des usines, des pièces d’armes et du matériel, les troupes d’occupation y installant un important service de réparations des camions de l’armée allemande.
La Direction de la F.N. et un certain nombre de travailleurs se replieront en France, à SAINT-ETIENNE, où une nouvelle usine d’armement sera créée pour soutenir l’effort de guerre allié.
Aucun véhicule ne sera produit durant la guerre 1914-1918. Lors de l’Armistice de 1918, l’usine sera mise sous séquestre.
Une fois dégagée du groupe allemand LOEWE en 1919 par l’entrée de l’Union Financière et Industrielle Liégeoise dépendant de la Banque de la Société Générale, elle reprendra ses activités mais, bon nombre de machines ayant été enlevées par les Allemands avant leur départ, le redémarrage de l’entreprise n’en fut que plus laborieux.
2. L’entre-deux guerres – expansion et fermeture de son secteur automobile.
Bénéficiant de la législation sur la réparation des dommages de guerre, et d’avances considérables consenties par la S.N.C.I., la F.N. en profita pour moderniser ses équipements et, en particulier, ceux du département des véhicules à moteurs sur lequel elle comptait pour prendre la relève des fabrications militaires que la nouvelle conjoncture internationale semblait “condamner à un déclin irrémédiable”.
A la tête de l’entreprise, nous trouvons les grands noms de la finance belge tels que J. JADOT auquel succédera en 1932 Alexandre GALOPIN, jusqu’en 1944 lorsqu’il fut assassiné par des collaborateurs à la solde de l’occupant. Tous deux furent également gouverneurs de la Société Générale de Belgique. Quant à la Direction générale, elle avait été confiée à Gustave JOASSART dès 1923. Les véhicules automobiles F.N., dont la production reprendra en 1920 ainsi que les motocyclettes dont la construction redémarrera la première, rencontrent un incontestable succes commercial à l’inverse des bicyclettes et de leurs accessoires dont la fabrication fut abandonnée en 1926.
Outre le châssis et le moteur, la société fabriquait désormais la carrosserie des voitures, laquelle était façonnée dans un atelier situé rue du Vieux Mayeur à LIEGE. Devant pareil développement du secteur des véhicules à moteurs, la société fit ériger sur un terrain nommé “Prê-Madame” et situé au nord-est des installations primitives, une usine nouvelle où cette fabrication y compris les opérations de carrosserie seront désormais concentrés.
Les travaux commencèrent en 1928 et s’achevèrent durant l’été 1929.
Simultanément, la F.N. rachetait aux Anciens Ets NAGANT les vastes locaux que ceux-ci possédaient au quai de Coronmeuse et y installait les services de réparation et d’entretien. Le souci d’augmenter l’importance des productions civiles de la société et d’assurer à celles-ci des débouchés réguliers en dépit des restrictions pesant sur le commerce international, amena la F.N. à adopter une ambitieuse politique de participation et d’expansion.
Ainsi développe-t-elle à PARIS la Manufacture d’Armes de PARIS (MAP) créée durant la guerre 1914-1918 qui entame la production de motocyclettes F.N. montées en France, en Suède dès 1928 une succursale la F.N. AKTIEBOLAGET afin de vendre dans ce pays des véhicules à moteur puis à AIX-LA-CHAPELLE en 1929 une usine destinée au montage des motocyclettes pour le marché allemand.
Trop hardiment sans doute, la F.N. s’oriente-t-elle vers des activités étrangères à son domaine d’origine, de sorte qu’elle sera frappée de plein fouet par la crise de 1929 où, endetéêe elle se trouvait particulièrement vulnérable, crise qui dura jusqu’en 1935 de sorte que certains départements de l’entreprise telle la division automobile devaient ne pas s’en remettre. Réduite pratiquement au marche intérieur suite à la fermeture des pays voisins, la F.N. perdit même en 1935 la protection douanière qui lui permettait d’affronter avec plus ou moins de succès la concurrence des importateurs de voitures étrangères. Devant celle situation, le Conseil d’Administration de la F.N. décide le 17 septembre 1935 d’abandonner la fabrication des automobiles et d’orienter l’usine vers la construction de véhicules spéciaux.
Bien que nécessaire, cette décision n’en fut pas moins douloureuse. La F.N. restera présente dans le domaine des véhicules utilitaires (camions, autobus et aulocars, trolleybus) mais aussi des tracteurs militaires à chenilles en caoutchouc (sous licence CITROEN-KEGRESSE) et véhicules destinés à l’armée. Elle poursuivait d’autre part la construction de ses célèbres motos. En 1937 et 1940 elle accepta de sous-traiter pour PEUGEOT le montage de 202, 302 et 402 dont elle assurait le garnissage et la peinture. Singulièrement, alors que l’usine à HERSTAL qui occupait 9.138 personnes en 1929 et n’en comptait plus que 2.580 en 1935, avec un endettement qui faillit ruiner la totalité de l’entreprise, la F.N. va se redresser à la suite de l’arrivée d’Hitler au pouvoir et de sa politique d’agression qui relancera ses productions militaires de sorte que la F.N. se retrouvera en pleine prospérité financière lorsque surviendra la Seconde Guerre mondiale.
Quelles furent les principaux produits automobiles de la FN. entre 1920 et 1935 ?
– 1920 trois modèles d’avant-guerre améliorés, radiateur modifié, voies élargies et ressorts plus souples : les 1250A – 2150 et 2700 AT (voir Exposition d’ANVERS de mai 1920) ainsi que la première nouvelle F.N. d’après-guerre, la 3800 de 25 cv présentée au Salon de LONDRES d’octobre 1920 et livrable au printemps 1921 avec ses évolutions les 3800T et 3800F jusqu’en 1925. Ce modêle 3800 sera habille par de grands carrossiers tels D’IETEREN, DENS, VESTERS et NEIRINCK, VAN DEN PLAS, WALCH, SNUTSEL et DE WOLF.
– 1922 : Au Salon de PARIS d’octobre 1922 présentation de la nouvelle 15 cv type 2200, 4 cyl. à soupapes latérales et 4 vitesses en bloc avec le moteur : c’est la première F.N. a avoir la direction à gauche et une commande centrale de la boîte de vitesses, dénotant l’influence américaine (puis 2200E à voies élargies et 2200F).
– 1923 : la F.N. présente le modèle qui sera son plus grand succès : la 1300 avec un moteur 4 cyl. à soupapes en tête commandées par culbuteur, des freins sur les quatre roues et des pneus ballons.
Il en sera produit 2.781 exemplaires, dont 200 de types sport qui s’illustrent dans différentes compétitions internationales.
Aux côtés de la 1300 sortira une 15 cv utilisant des techniques similaires suivie des 1300D et 1300E à boîte 4 vitesses et voies élargies.
– 1927 à 1933 : Les F.N. 10 cv 1400, 11 cv tôlées et 11 cv “1625” dérivant de la 1300 et versions deux carburateurs type sport type 1800 de 1775 cc (4 cyl. 75 x 100) atteignant 100 km/h.
– 1930 à 1935 : Au Salon de BRUXELLES de décembre 1930 fui présentée une 8 cylindres en ligne à soupapes latérales et boîte 4 vitesses, véhicule conçu par l’ingénieur WARNANT (issu de chez PIPE). Ce véhicule fut construit à 371 exemplaires seulement (ce modèle gagnera la Coupe du Roi aux 24 h de FRANCORCHAMPS de juillet 1932).
– 1933 : la 1625 aux formes dépassées est remplacée par la F.N. “42” dite Prince Baudouin 4 cyl., 2 l. à soupapes latérales et carrosserie tout acier, puis la “Prince Albert” dernière réalisation automobile de la marque – version plus puissante et coûteuse. Il sera fabrique 1.274 exemplaires de la “Prince Baudouin” et 499 exemplaires de la “Prince Albert” et quelques châssis de la Prince Albert seront habillés par le carrossier liégeois, PRITCHARD-DUMOULIN, de caisses aérodynamiques dites “surprofilées”. Quant au prototype Prince Albert à roues indépendantes, l’arrêt de la production en 1935 ne lui permettra pas de voir le jour et d’être mis en production.
3. La survie de ses divisions en tant que constructeur de poids lourds et de motocyclettes
L’usine sera occupée par les Allemands en 1940 et partiellement détruite par les bombardements alliés avant d’être occupée en 1945 par l’armée américaine. En 1947 la production reprend dans le secteur de la motocyclette (suspension originale à “roue tirée”) production qui ne sera arrêtée définitivement qu’en 1962 – ainsi que des camions destinés à des usages aussi bien commerciaux que militaires. Ainsi en 1950 une commande de plus de 4.000 camions pour l’armée belge amènera la collaboration entre F.N., MIESSE et BROSSEL. Les derniers véhicules sortiront dans les années septante, la F.N. ayant orienté depuis lors ses seules productions vers l’armement et les moteurs d’avions.
Quant aux archives de la F.N. relatives à sa production de véhicules motorisés, c’est le Musée du Circuit de FRANCORCHAMPS ancienne Abbaye de STAVELOT qui en est aujourd’hui le dépositaire.